L’analyse que Freud fait de la sexualité du suçotement dans les Trois essais sur la théorie sexuelle joue un rôle central dans l’appareil théorique psychanalytique. Elle est au fondement même de la conception freudienne de la sexualité infantile ainsi qu’il l’explique à plusieurs reprises dans son livre :
Constater que nous n’avons plus grand-chose d’important à apprendre de l’activité sexuelle de l’enfant dès lors que la pulsion nous est devenue compréhensible à partir d’une seule zone érogène ne peut que nous réjouir au plus haut point. (Trois essais, p. 168)
Je résume : « Maintenant qu’on a analysé la sexualité du suçotement, on sait presque tout ce qu’il y a à savoir de la sexualité infantile ! » Carrément ! Eh, Freud, tu déconnes !?
L’affirmation est ridicule, elle devient grotesque si l’on se souvient que rien dans le raisonnement de Freud ne permet de conclure à la sexualité du suçotement. Si l’on prend son affirmation au pied de la lettre, on ne peut que conclure que le deuxième de ses trois essais sur la théorie sexuelle est construit sur du vide, et peut alors être rejeté sans autre forme de procès. Toutes les constructions théoriques que Freud déploie à la suite de son analyse du suçotement, la théorie de l’étayage, les organisations prégénitales de la pulsion, etc., ne sont rien de plus que des histoires à dormir debout sans le moindre fondement.
Je pourrais tout à fait m’arrêter là, cependant un psychanalyste avisé (si cela est possible) me rétorquerait que ce n’est pas parce que Freud fait un travail déplorable que l’idée qu’il cherche à défendre est fausse. Ne se pourrait-il pas, malgré tout, qu’il ait raison ? À quoi je répondrai : Allons-y Alonso ! Existe-t-il dans la littérature scientifique actuelle la moindre raison de croire que lorsqu’un enfant suce son pouce, il est en train de faire un geste qui lui procure un plaisir sexuel ? Non, juste non, simplement non, et cent fois non ! En fait, hors de la psychanalyse cette idée n’a eu aucun écho. À tel point que la prévalence du terme « thumb-sucking » (sucer son pouce) dans la littérature suit précisément les fortunes de la psychanalyse. Avant la psychanalyse, on ne s’intéresse que très peu au fait de sucer son pouce. Après la psychanalyse, on continue de très peu s’y intéresser.
Cela dit, s’il est intéressant de le savoir, cela n’a guère d’utilité dans le débat présent. Après tout, Freud pourrait bien avoir raison contre le reste du monde. D’autant que l’idée qu’il ait pu y avoir quelque chose de sexuel derrière le suçotement a eu un certain écho chez les pédiatres et les sexologues de la fin du XIXe siècle (Gillis, 1996; Kern 1973).
La sexualité du suçotement selon Freud
Afin de voir si Freud peut avoir raison, il faut commencer par regarder les conclusions auxquelles il affirme être parvenu. Cela permettra ensuite de les comparer avec les données dont nous disposons aujourd’hui.
Observant le suçotement ou succion délectable, nous avons déjà pu noter les trois caractères essentiels d’une manifestation sexuelle infantile. Celle-ci se constitue par étayage sur l’une des fonctions corporelles vitales, elle ne connaît pas encore d’objet sexuel, elle est autoérotique, et son but sexuel est soumis à la domination d’une zone érogène. Anticipons en disant que ces caractères vaudront aussi pour la plupart des autres activités des pulsions sexuelles infantiles. (Trois essais, p. 164)
Outre le fait que Freud affirme encore une fois que la sexualité du suçotement sert de modèle pour comprendre la sexualité infantile. Il fait 3 affirmations importantes.
(1) La bouche est une zone érogène. C’est-à-dire une « aire de peau ou de muqueuse sur laquelle des stimulations d’une certaine nature suscitent une sensation de plaisir d’une qualité déterminée » (Trois essais, p. 165)
(2) Lorsque le nourrisson tète le sein de sa mère pour boire du lait, sa bouche, qui remplit sa fonction nutritive, lui procure dans le même temps, du fait de la succion, un plaisir de nature sexuelle. Cela le prédispose plus tard à rechercher le plaisir de la succion. C’est ce que l’on appelle la théorie de l’étayage.
Il est par ailleurs clair que l’action de l’enfant qui suçote est déterminée par la recherche d’un plaisir déjà vécu et à présent revenu à la mémoire. En suçant de manière rythmée une aire de peau ou de muqueuse, il trouve alors, dans le cas le plus simple, une satisfaction. Il est du reste facile de deviner en quelles occasions l’enfant a fait les premières expériences de ce plaisir, qu’il aspire maintenant à renouveler. La première activité de l’enfant et la plus vitale, téter le sein maternel (ou l’un de ses succédanés), ne peut que l’avoir familiarisé avec ce plaisir. (Trois essais, p. 162)
(3) La succion n’a pas d’autre objet qu’elle-même. Ce qui fait qu’une fois qu’ils ne peuvent plus recevoir de plaisir en tétant le sein de leur mère, certains enfants, pour qui la bouche est une zone érogène particulièrement importante, vont tenter de se satisfaire en tournant leur succion vers une autre partie de leur corps. C’est la thèse de l’autoérotisme.
Pour sucer, l’enfant ne se sert par d’un objet étranger, mais plutôt d’une aire cutanée à lui, parce que celle-ci est plus commode pour lui, parce qu’il se rend ainsi indépendant du monde extérieur (...). (Trois essais, p. 163.)
En résumé, un nourrisson est poussé, du fait d’une pulsion à la fois nutritive (la faim) et sexuelle (la libido), à effectuer avec sa bouche un mouvement de succion, qui lorsqu’il rencontre le sein de la mère lui procure un plaisir de nature sexuel. Cette pulsion s’exprime par un « sentiment de tension particulier, qui prend plutôt le caractère du déplaisir, et par une sensation de démangeaison ou de stimulation » (Trois essais, p. 167). Il cherchera ensuite à reproduire cette sensation de plaisir au moyen de son propre corps lorsqu’il ne pourra plus avoir accès au sein de sa mère.
Le suçotement n’est pas causé par une pulsion, c’est un réflexe
On se doutera que rien de ce que dit Freud du suçotement n’a été validé par la suite. Le suçotement n’est pas causé par une pulsion. Il ne cause aucun plaisir ou excitation, ni sexuelle ni autre. Ce n’est pas la séparation avec le sein qui pousse certains enfants à sucer leur pouce. Rien ne permet pour finir de lier le fait de sucer son pouce à la masturbation. Bref, ce que dit Freud est tout simplement faux.
Le consensus qui existe aujourd’hui sur le suçotement est qu’il s’agit d’un comportement réflexe comme beaucoup d’autres comportements que l’on constate chez les nourrissons. Or, pour Freud, le suçotement est le résultat d’une pulsion, qui, comme l’explique Laplanche et Pontalis « à sa source dans une excitation corporelle (état de tension); son but est de supprimer l’état de tension qui règne à la source pulsionnelle. » (Vocabulaire de la psychanalyse, p. 360). Le problème est ici que les études montrent que le suçotement n’est pas précédé par un « sentiment de tension particulier » (Trois essais, p. 167), une sensation de gêne ou de démangeaison, comme c’est le cas lors d’un éternuement par exemple (Friman, 2006, p. 201). Cette sensation censée exprimer la pulsion, et qui est si centrale par exemple dans l’analyse que Freud fait du cas Dora (cf. ce billet), n’existe en fait pas du tout.
On sait de plus qu’un certain nombre de fœtus sucent leur pouce in utero dès la 14e semaine de gestation (Modrell, A. K., & Tadi, P., 2023), bien que l’on ne possède pas de données chiffrées sur le sujet (Friman, 2006, p. 201). Ce constat contredit directement l’affirmation de Freud qu’un enfant ne suce son pouce qu’afin de reproduire le plaisir ressentit lors de la succion du sein de la mère qui lui est désormais inaccessible. Je reviendrai sur ce point un peu plus loin. On sait de plus que jusqu’à 95 % des nouveau-nés sucent leur pouce, et que l’absence de ce comportement est en fait un symptôme probable de problèmes développementaux (Friman, 2006, p. 201).
Le suçotement n’est donc pas le résultat d’une pulsion, mais plutôt un réflexe, c’est-à-dire une réaction spontanée à un stimulus, en l’occurrence le contact d’un objet avec la bouche (Woolridge, 1986).
Le suçotement ne cause pas de plaisir ou d’excitation, mais un apaisement
Pour Freud, la succion permet de résoudre la tension à l’origine de la pulsion et procure un sentiment de plaisir. Évidemment, c’est du grand n’importe quoi, puisqu’il n’y a pas de pulsion à l’origine de la succion. Il n’y a pas non plus de sensation de plaisir résultant celle-ci. Il est vrai en revanche que le lait maternel procure au nouveau-né un plaisir intense :
L’effet du lait (ou du moins du saccharose qu’il contient) sur le nouveau-né est très puissant (c’est-à-dire très renforçant) et, en fait, on pense qu’il suit une voie opioïde [...]. En d’autres termes, à certains égards, les effets du lait (ou plus spécifiquement du saccharose) sur les nouveau-nés ressemblent à ceux produits par un groupe de renforceurs (reinforcer) parmi les plus puissants connus de l’homme, les narcotiques [...]. (Friman, 2006, p. 210)
Ce n’est donc pas la satisfaction d’une pulsion nutritive ou sexuelle qui produit le plaisir du nouveau-né, mais les propriétés du saccharose, ce qui vient, là encore, contredire la thèse de Freud.
Quoi qu’il en soit, l’effet de la succion elle-même sur le nourrisson est en fait l’exact inverse de ce que Freud affirme. Loin de procurer du plaisir, la succion vient en fait apaiser l’enfant et le couper du monde, comme l’explique Pimenidis dans la prose inimitable des scientifiques qui n’écrivent que pour des spécialistes :
[...] la stimulation monotone et répétitive des sens oraux par la succion du pouce (le même stimulus de même intensité est continuellement répété pendant une longue période) peut induire une adaptation (fatigue) et un déclin de la sensibilité des récepteurs de la bouche qui finissent par cesser de fonctionner, privant le cortex de l’entrée sensorielle normale, ce qui entraîne une altération de la capacité d’apprentissage, de la perception et de la commande motrice des muscles. [...]
La privation sensorielle du cerveau résulte de l’altération de la fonction du Système Réticulé Activateur Ascendant (SRAA) de la formation réticulaire. La fonction formelle du SRAA est nécessaire à l’éveil du cerveau pour l’attention, la conscience et l’apprentissage conscient. Sans la collaboration du SRAA, les informations sensorielles orales ne peuvent pas être projetées de la formation réticulaire vers le cortex. Il en résulte une absence de discrimination des sens oraux et donc une privation sensorielle. [...]
Ainsi, la succion du pouce peut induire une privation sensorielle et, inversement, la privation sensorielle orale peut induire l’activité de l’habitude par le biais du SRAA affecté. [...]
Le fait que de nombreux enfants sucent leurs doigts pour réduire le stress mental afin de dormir peut suggérer que ces enfants cherchent à s’isoler de l’environnement et que la succion du pouce contribue à réduire l’entrée de stimuli externes dans leur cerveau. En d’autres termes, ces enfants subissent une « désafférentation fonctionnelle » du cortex, qui est le substrat du cerveau endormi. (Pimenidis, 2009, p. 27-28)
En gros, lorsqu’un enfant suce son pouce, le mouvement répété et monotone de la succion permet à son cerveau de s’isoler du monde qui l’entoure, ce qui lui permet de se calmer et de s’endormir tranquillement.
La séparation avec le sein ne cause pas le fait de sucer son pouce
J’ai déjà cité plus haut, un passage de Freud où il défend l’idée que c’est lorsque l’enfant est séparé du sein de mère et ne peut plus s’y nourrir qu’il se met à sucer son pouce. Je me permets de le citer à nouveau :
Il est par ailleurs clair que l’action de l’enfant qui suçote est déterminée par la recherche d’un plaisir déjà vécu et à présent revenu à la mémoire. En suçant de manière rythmée une aire de peau ou de muqueuse, il trouve alors, dans le cas le plus simple, une satisfaction. Il est du reste facile de deviner en quelles occasions l’enfant a fait les premières expériences de ce plaisir, qu’il aspire maintenant à renouveler. La première activité de l’enfant, et la plus vitale, téter le sein maternel (ou l’un de ses succédanés), ne peut que l’avoir déjà familiarisé avec ce plaisir. (Trois essais, p. 162.)
Ok Sigmund, et sinon tu penses quoi de cette image d’un fœtus qui suce son pouce in utero ?

On a aujourd’hui suffisamment de données pour savoir, comme je l’ai dit plus haut, que dès la 14e semaine, les fœtus portent leur pouce à la bouche et le suce. On sait aussi que 95 % des nouveau-nés sucent leur pouce. Bref, ce n’est pas la recherche du plaisir que le sein lui a procuré qui pousse un bébé à se mettre à sucer son pouce.
On peut aussi noter le fait que sucer son pouce semble être un comportement sujet à certaines variations culturelles. En Occident, environ 50 % des enfants entre 2 et 3 ans sucent leur pouce. Ils ne sont plus que 25 % à le faire autour de 5 ans (Friman, 2006, p. 201). En revanche, ce comportement semble être absent en Nouvelle-Guinée (Mead, 1963, p. 68), et très peu fréquent chez les Hopis. (Dennis, 1940, p. 181, rapporte que seuls 6 % des enfants entre 2 et 9 ans suçaient leur pouce).
Ngom et. al. proposent une revue de littérature sur ce comportement qu’il est pertinent de citer dans son intégralité :
Les taux de prévalence des HSNN [Habitudes de Succion Non-Nutritive] rapportés par différents auteurs sont très variables.
Ainsi, dans une étude longitudinale sur trois années et portant sur 60 enfants suédois, Larsson a trouvé 10 % de prévalence de la succion digitale et 72 % de succion de tétine.
En Grande-Bretagne, North, et al. ont étudié la prévalence de l’utilisation de la tétine et de la succion digitale chez 10 006 enfants britanniques âgés de 15 à 18 mois. Leurs résultats ont montré que la tétine était proposée régulièrement à 36,3 % des enfants et que 21,3 % suçaient leurs doigts.
Aux États-Unis, Warren, et al. ont réalisé une étude de cohorte portant sur 600 enfants (de 0 à 36 mois) dans le but d’identifier les facteurs prédictifs des habitudes de succion non nutritive. Ils ont trouvé une prévalence des HSNN de 20 % commencées à la naissance jusqu’au moment de la publication de leurs résultats préliminaires à l’âge de 36 mois.
Les études africaines sur la prévalence des habitudes de succion non nutritive nous proviennent pour l’essentiel du Nigeria. Onyeaso a étudié la prévalence des habitudes de succion chez 493 enfants du district d’Ibadan au Nigeria. Ses résultats montrent que 9,9 % des enfants avaient au moins une habitude de succion non nutritive. La plus fréquente était la succion digitale (8,1 %) suivie de la succion labiale (1,2 %). Dans une autre enquête sur les besoins en traitements orthodontiques interceptifs chez 563 enfants nigérians (289 garçons et 274 filles) âgés de 3 à 5 ans, Onyeaso, et al. ont trouvé un taux de prévalence de 12,5 % de succion digitale.
Au Moyen-Orient, Farsi et Salama ont trouvé une prévalence des HSNN de 48,36 % avec une prédominance de l’utilisation de la tétine chez des enfants saoudiens âgés de 3 à 5 ans vivant dans la ville de Riyad. Les enfants qui utilisaient la tétine l’ont arrêté dans les premières années de leur vie alors que la majorité des enfants qui suçaient le doigt ont prolongé cette habitude jusqu’à l’âge de 5 ans
En Inde, Shetty et Munshi ont fait une enquête sur les habitudes de succion non nutritive sur un échantillon de 4 590 enfants habitant la région de Mangalore. Ils ont trouvé que 29,7 % de cette population infantile avaient des habitudes orales néfastes parmi lesquelles 3,1 % concernaient la succion digitale. (Ngom, 2008, p. 104)
Personne n’est aujourd’hui en mesure d’expliquer ces variations culturelles. On soupçonne cependant que le fait d’être nourri au biberon plutôt qu’au sein joue un rôle. Ce que semble confirmer une étude étonnante menée sur des veaux qui multiplient les comportements de succion non nutritive lorsqu’ils n’ont pas été nourris au pis de leur mère (Veissier, 2002). Ce qui est certain en revanche, c’est que si l’explication freudienne du suçotement était la bonne, ces différences ne devraient même pas exister. Puisque toutes les mères finissent par sevrer leur enfant quelque soit la culture, et que la seul chose, selon Freud, qui explique qu’un enfant suce son pouce, c’est que chez lui, « l’importance érogène des lèvres est constitutionnellement renforcée » (Trois essais, p. 163)1, on devrait constater, à travers les cultures, qu’une proportion sensiblement identique d’enfants finit par sucer son pouce.
Il n’existe aucune donnée qui lie le suçotement et la masturbation
Rien dans nos connaissances actuelles ne permet d’envisager que Freud ait pu avoir raison sur le suçotement. Sur la question de son lien avec la masturbation, c’est presque pire. Nous sommes face à une absence complète de donnée pouvant lui donner raison. Les deux revues de littérature sur la masturbation que j’ai consultées (Leung, 1993 et Mallants, 2008) n’évoquent même pas la question de la succion non nutritive, alors qu’elles couvrent toutes les deux une vaste de gamme de phénomènes (masturbation in utero [oui], masturbation anale [extrêmement rare. Sigmund ???], etc.). Une recherche dans Google Scholar avec les termes « child masturbation sucking » ne produit presque que des résultats d’études psychanalytiques des années 1950-1960. Les rares exceptions sont des articles historiques et un article extrêmement douteux écrits par une équipe de médecins iraniens qualifiant le suçotement de trouble du comportement (Tashakori 2017)
Bref, c’est un vide sidéral, et Friman offre un excellent résumé de la situation en face de laquelle on se trouve :
Bien qu’elle n’ait jamais été étayée par des données, qu’elle ait été ignorée ou rejetée à plusieurs reprises par les théories qui ont été proposée et qu’elle ait été critiquée dans des présentations scientifiques, cette interprétation continue d’être utilisée par les professionnels. Il semble toutefois évident que l’interprétation auto-érotique a été amplement entendue et qu’en l’absence de données permettant de la soutenir, elle peut être ignorée ici sans pénalité. (Friman, 2006, p. 204)
La messe est dite. Merci, au revoir !
En résumé
L’image qui se dessine de cette revue de nos connaissances actuelle sur la succion nutritive et non nutritive s’oppose complètement à celle que Freud proposait. La succion est un comportement réflexe qui n’a pas pour origine une tension pulsionnelle et qui ne procure aucun plaisir au nouveau-né, mais au contraire qui a tendance à l’endormir. De plus, ce n’est pas lorsque l’enfant est sevré du sein de sa mère qu’il se met à sucer son pouce, mais ce comportement apparaît dès la 14e semaine de gestation et se poursuit parfois jusqu’à la fin de l’enfance. Il semble aussi plus prévalent dans les sociétés où les mères sèvrent les enfants plus tôt, et lorsqu’elles les nourrissent avec des biberons. Pour finir, il n’existe aucune raison de croire que ce comportement est moindrement lié à la masturbation et donc pourrait donc avoir une quelconque nature sexuelle.
Autant dire qu’il n’y a rien à sauver de l’analyse freudienne du suçotement. Ce qui a comme conséquence qu’il est fort probable que c’est toute la théorie de la sexualité infantile de Freud qui est à rejeter de manière irrévocable. Bref, bye bye Freud !
Ce que Freud entend par « constitutionnellement renforcée » n’est pas clair dans le texte. Cependant, il semble que cela réfère à des facteurs biologiques qui seraient en quelque sorte innés.